Que reste-t-il lorsque la mémoire des moments d’avant a disparu ? Ne reste t-il qu’à vivre la suite des moments présents ?
Certains de nos lieux, de nos maisons, semblent n’être destinés qu’à la succession des instants, fugitifs. La « vie moderne » a inventé des espaces livrés à l’attente, au désœuvrement, et destinés à dompter l’impatience. Les salles d’attente des hôpitaux, des administrations, les salles de concert, les stades, les espaces publics en général, rassemblent des dizaines, des centaines, des milliers de corps et de visages pris dans l’interrogation d’un être ensemble hasardeux et fugace. Que l’on se retrouve momentanément rapprochés, dans le même séjour, dans l’espoir de la résolution d’un problème, intime, financier, juridique, de santé, ou que la réunion de nos corps précède dans la fébrilité le partage à venir d’une émotion musicale ou théâtrale, nos singularités ont du mal à résister à l’embarras de soi, à la dictature du comportement. Ici et là, les regards se croisent, glissent le plus souvent les uns contre les autres. Il s’agit que notre liberté ne soit pas compromise dans l’interprétation d’un coup d’œil.
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Archives par mot-clé : roman
Aharon Appelfeld, histoires d’une vie
Beaucoup d’articles ont été publiés sur l’œuvre et la vie de Aharon Appelfeld, récemment décédé. Rappelons qu’il a été tardivement reconnu en France, et que fort heureusement, les éditions de l’Olivier s’attachent à rattraper ce retard et à nous proposer de nombreux textes de cet écrivain prolifique et passionnant.
KONG
Michel Le Bris
Kong
Grasset
Michel Le Bris est un romancier qui impressionne par son habileté et sa puissance d’évocation. On a l’impression que seul des personnages hors du commun pris dans des époques qui appellent le dépassement de soi sont à sa dimension.
Climats de France
Marie Richeux
Climats de France
Éditions Sabine Wespieser
Climats de France est un livre empreint de lumière. Comme si Marie Richeux respectait ainsi l’injonction amicale de Malek, ce témoin, voisin et ami, personnage central de son roman. Cette recommandation, qui clôt le livre, est tout à la fois une prière, l’expression de la mémoire des choses inoubliables, de l’au-delà de l’exil, le goût de la beauté, et aussi une juste reconnaissance. N’oublie pas ce qu’il y a d’incomparable là-bas, mais comme partout en fait, c’est la clarté. Surtout, pense à la clarté, dit Malek.
Sigma
Julia Deck / Sigma / Éditions de Minuit
Dans son premier roman, Viviane Elisabeth Fauville (Minuit, 2012), Julia Deck engageait son personnage dans une itinérance dans Paris après un crime indéterminé, singulier, un raptus, diraient les psychiatres. C’est à un autre raptus qu’elle va nous conduire, à la fin de ce troisième roman, au titre un peu « vintage », Sigma, un titre qu’un écrivain comme Claude Ollier n’aurait pas réfuté, et que les Éditions de Minuit viennent de publier. Mais n’anticipons pas. Il faut laisser le lecteur faire son chemin dans ce livre qui aime les faux-semblants, et où l’on trouverait les couleurs, les lumières contrastées et les décors des films d’Alain Resnais.
Lectures d’été
Goûters littéraires à l’ombre du patio
Pour lire à l’ombre de votre été, des suggestions de lectures depuis le patio de la librairie, par vos libraires d’Ombres Blanches vous sont proposées les lundi 26, mercredi 28 juin, mercredi 5 et jeudi 6 juillet.
Une sélection singulière, voire intempestive, mais amicale, depuis votre librairie, et par vos libraires, pour agrémenter les jours avec (ou sans) soleil, du niveau de la mer jusqu’aux cimes les plus enviables.
Venez découvrir nos conseils autour d’un verre de limonade, dans le patio entre 18 h et 19 h 30 !
Denise au Ventoux / Verdier
Il y a dans les pages de Denise au Ventoux quelque chose comme les accents d’une schizophrénie. Cela procèderait de l’interrogation de l’animalité, qui est au cœur des pages de ce livre, mais plus encore de la part animale que l’auteur traque dans son narrateur, une part animale qui en serait la plus sensible, la plus attentive aux êtres et à la vie. De même qu’il existerait deux champs d’observation pour Paul, le narrateur, celui d’abord des humains et de leur cirque quotidien, celui ensuite qui obsède son regard, capturé par les signes d’intelligence de Denise, la chienne dont il hérite « provisoirement » et naturellement, de même le roman, qui fait le récit de cette liaison entre homme et chien(ne), est-il divisé en deux approches du genre romanesque.
Denise Epstein / Théâtre Garonne
Ce texte a été écrit et lu par Christian Thorel au Théâtre Garonne le 1er décembre 2016 à l’occasion d’une soirée consacrée à Denise Epstein dans le cadre des journées de la culture juive.
Survivre et vivre. Ses amis savent le titre du recueil d’entretiens que Denise eut avec Clémence Boulouque, et qui suivit, trois ans après, la sortie de Suite française, un des grands évènements de l’édition des premières années du nouveau siècle. Pensant à celles et ceux qui vécurent la shoah, la menace, la souffrance ou la mort, la mémoire massacrée et le souvenir impossible, on n’oublie ni la dimension du mot « survivre », ni celle du mot « vivre ». Continuer la lecture
Nos conseils de Noël : Beaux livres
Nos conseils de Noël: Beaux livres
Un livre on aime aussi qu’il soit beau avec des illustrations qui nous régalent les yeux, qu’il soit plus grand pour y voir mieux, et qu’il dure longtemps pour le revoir souvent ! On pense souvent beaux-livres : beaux-arts, pourtant dans toutes les disciplines représentées à la librairie il y a des livres qui valent vraiment le détour ! Petite sélection.
Les livres présentés ici sont également disponibles sur ; www.ombres-blanches.fr
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Marie N’Diaye, La Cheffe
Marie N’Diaye, La Cheffe, roman d’une cuisinière, Éditions Gallimard.
Dans le dernier roman de Marie N’Diaye, un homme remonte le temps et raconte la vie de la Cheffe, une cuisinière. Cette voix qui raconte et qui tient très bien son récit, (comme si il était déjà façonné par la répétition), dévoile progressivement le portrait d’une femme mystérieuse, assez libre et courageuse, solitaire, généreuse, un peu farouche. Continuer la lecture