Je me souviens des livres du Nord par lesquels il avait débuté son œuvre romanesque. Sans doute Luc Lang, à la fin des années 80, ignorait-il les traces qu’il ferait suivre à ses lecteurs, plus de trente ans après. Dans un essai publié en 2011, Luc Lang précise ce qui le tient au travail de la littérature, et ce qu’il entend comme projet et comme conduite de l’entreprise romanesque. Il faudra y revenir. Ce qui paraît sûr, ce sont les deux conditions que Luc Lang tient comme majeures pour ses fictions : des personnages, des lieux, et qui fondent une œuvre littéraire.
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Continuer de Laurent Mauvignier
L’émission de Laure Adler avec Laurent Mauvignier du 29 Septembre dernier débuta avec une chanson de Neil Young. Cette ballade folk était très bien choisie pour introduire la conversation car il y a dans cette chanson comme dans les romans de Laurent Mauvignier de la tendresse et une proximité avec des personnages que l’on imaginent sur le départ où sur le retour et qui se battent contre les vacheries de la vie. Continuer est un roman qui explore des espaces, géographiques et intimes, et le lien qu’ils entretiennent avec les personnages me fait naturellement penser à la littérature américaine. Alors, avec la voix de Neil Young en prime, il m’est difficile de ne pas penser que Laurent Mauvignier est aussi, à sa façon, un écrivain américain.
Jean-Baptiste Del Amo / Le Règne animal / Gallimard
Ce qui est en jeu dans le quatrième roman de Jean-Baptiste Del Amo pourrait être la violence du monde. Pour la mettre en jeu, le romancier a recours au milieu le plus approprié, la famille. Il choisit de créer une famille née de « presque rien », autre qu’un pur amour aux bords de l’inceste (une union entre cousins), et dont la descendance va assumer dans le silence et dans l’oubli cette origine brutale, aux confins de la sauvagerie. A ce banquet des passions sont conviés la tragédie antique, méditerranéenne, un panthéisme ravivé par la proximité de la nature et des animaux, la Bible et ses figures fondatrices, pères, mères, frères, Caïn et Abel, les Évangiles et leur « supplément » apocalyptique, la religion catholique et son cortège de règles, de fautes, de contrition.
Lettre à Laurent Mauvignier
Continuer aux éditions de Minuit
Cher Laurent,
A fréquenter depuis bientôt quarante ans les écrivains, je perçois l’inquiétude qui est la leur des premiers lecteurs, puis de l’accueil des « critiques », des libraires, et enfin du public. Dans ce monde englué dans la communication, pas de règles, hormis celle qui consiste à surprendre, à accélérer, à faire fi des fidélités, ce qu’on appelle oubli sans doute. Tout le contraire de ce que vous, comme d’autres écrivains, nous donnez à méditer, la dimension de plusieurs temps produits dans les heures auxquelles nous attache la lecture d’un roman : temps de la narration, temps de l’action, temps des personnages, temps historique, temps géographique, temps géologique même (c’est le cas dans Continuer). Je prends ici le risque d’un autre temps et d’une autre matière, ce que la mémoire de votre livre a déposé comme souvenirs, comme traces, images, pensées, émotions.
Jean-Paul Dubois / La Succession / Éditions de l’Olivier
Parmi les lieux qui semblent difficiles à prendre au sérieux, Miami se taille une belle part. Les images du rêve américain des années des deux après-guerres cachent difficilement une histoire du sud. Ici, l’esclavage et les guerres indiennes autour du Mississippi ont fait la place, depuis un siècle, aux bateaux de plaisance, aux maillots deux-pièces et autres accessoires, aux palaces et autres voitures de luxe, casinos, mafia et huile de bronzage. Ces fantaisies qui fascinent ou exaspèrent les vieux habitants de l’Europe, Jean-Paul Dubois les connaît bien, il en a rendu compte dans ses chroniques sur l’Amérique, avec un regard interrogatif, parfois médusé, souvent amusé toujours amical.
LA FAMILLE
Nabokov au début de Ada ou l’ardeur nous rappelle l’incipit du roman de Tolstoï Anna Karenine :
« Toutes les familles heureuses sont plus ou moins différentes, toutes les familles malheureuses se ressemblent plus ou moins. »
C’est donc avec la famille, les pères, les mères, les enfants, tout ce qui fait le terreau de ce que nous sommes en bien comme en mal que nous vous invitons à passer la fin de l’année.
Et puis la famille c’est aussi celle qu’on se choisit, celle qu’on décide d’avoir. En cela la grande communauté des écrivains peut en être une…
Marin mon cœur
Eugène Savitzkaya, Minuit, 2010
Dans ce livre, tout se passe pour la première fois. Marin découvre le monde et le monde découvre Marin. Marin ou une partie de Marin peut se dissoudre dans l’eau et s’élever dans l’air. Marin est hypnotisé par un chat. Marin oblige la mer à s’aplatir. Marin mange du poisson et Marin mange de la terre. Le riz fait rire Marin. Marin ou une partie de Marin s’enfuit en carrousel. Qui est Marin et de quoi est-il fait ? À ces deux questions, il n’existe qu’une réponse. Mais l’auteur préfère donner sa langue au crapaud-buffle.
Avec Serge Mestre
Avec Serge Mestre
Comment parler des livres que nous aimons, lorsqu’ils sont écrits par des personnes qui font partie de nos vies. Parmi les auteurs que j’aime, rares sont ceux, comme Serge Mestre, avec lesquels les moments de partage et d’amitié sont aussi anciens, et solides. C’est autour de la peinture et de la littérature que nous nous réunissions à Castres, dans les années de nos vingt ans. Entre 1970 et 1980, il était bon de renverser le chaudron des vieilles valeurs, la figuration en peinture et la fiction dans le roman. Les performances formelles, les objectifs politiques, étaient les obsessions de nos éveils à l’art et à la littérature.
Les baleines contre-attaquent
On a eu peur !
Craig Thompson qui fait de la SF ? Qui abandonne ses récits oniriques et touchants pour s’envoler vers des cieux loufoques et colorés ? Qui s’aventure sur les terres de la BD jeunesse ?
Ça fait quelques mois que la version originale me fait de l’œil, fan de ‘Blankets’ oblige, mais je restais sceptique. Changement trop radical à mes yeux, couverture un peu passe partout, titre farfelu, j’avais peur que Craig Thompson perde sa place dans mon panthéon des auteurs de roman graphique. Puis voilà que la traduction sort chez Casterman et finalement je craque.
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Emmanuel Todd – Propos épars…proposés par Ombres blanches
Emmanuel Todd à Ombres blanches
Entretien avec Emmanuel Todd lors de sa venue à la librairie le 14 octobre 2011 à l’occasion de la publication de son livre L’origine de systèmes familiaux (Gallimard)
Interviewé et filmé, caméra à la main, par Mihai Mangiulea
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