Marie N’Diaye, La Cheffe

Marie N’Diaye, La Cheffe, roman d’une cuisinière, Éditions Gallimard.

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Dans le dernier roman de Marie N’Diaye, un homme remonte le temps et raconte la vie de la Cheffe, une cuisinière. Cette voix qui raconte et qui tient très bien son récit, (comme si il était déjà façonné par la répétition), dévoile progressivement le portrait d’une femme mystérieuse, assez libre et courageuse, solitaire, généreuse, un peu farouche.

Le narrateur semble perdu, en tout cas, il semble ne plus avoir totalement l’énergie nécessaire pour vivre entièrement, sauf de raconter la vie de la Cheffe qu’il a aimé d’un amour obsessionnel et silencieux. Son récit se constitue d’éléments d’histoire que la Cheffe lui a raconté, mais aussi de ses souvenirs et encore d’interprétations d’hypothèses qui remplissent les zones inconnues de la vie de la Cheffe. A-t-il trahi, a-t-il-fouillé, a-t-il recherché des informations sur lesquelles il n’avait aucun droit ? Son récit est-il déformé, reconstitué à partir de ce sentiment amoureux fantasmé ? Peut-être que ce roman (ce très beau roman) contient ces questions mais ce qui est sur, c’est que ce roman (ce magnifique roman) en contient sûrement beaucoup d’autres, car ce roman (assez incontournable) écrit en profondeur la complexité d’une vie. Et la phrase, et le rythme et la mélodie, et le temps et la relance, posent les mots. La Cheffe a une position extrême face à la pratique de la cuisine et sa vie est centrée sur son travail qu’elle pense comme un des beaux arts. Je crois que la Cheffe est une esthète, elle recherche le beau et plus encore que l’harmonie, peut-être rechercherait elle, par la réalisation de ces rares plats, à rééquilibrer le monde, à pacifier l’ordre des choses, par l’assiette. Il y a de la sobriété mais aussi une impensable fantaisie, parfois presque indétectable à l’œil, et il y a aussi cette présence poétique et imaginaire de la couleur bleu par laquelle (et c’est encore une hypothèse) la Cheffe nous apprend quelque chose du monde, son sens tragique et peut être aussi l’idée bizarre de rester modestement utile. Dans quelques années ce livre sera un classique, j’en fais le pari. C’est un grand plaisir de pouvoir le lire aujourd’hui et ce plaisir invite à le faire partager.

Nous recevrons Marie N’Diaye le mardi 14 février à 18h à la librairie

Vous pouvez retrouver le livre ici :

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