Exposition Disconnecting people par Julien Falsimagne

Au café Côté Cour du 5 mars au 24 mars

Exposition Disconnecting people par Julien Falsimagne

Vernissage vendredi 9 mars à 18h

exposition falsimagne disconnecting people ombres blanches
Fin 2014, le photographe Julien Falsimagne est parti travailler deux mois à Séoul en
Corée du Sud. Dès son premier trajet en métro, quel ne fut pas son étonnement face à
tous ces individus connectés à leurs écrans.
La première ligne de métro à Séoul date de 1974. Les lignes suivantes ont été inaugurées
à la fin des années 70 et dans les années 80, notamment en prévision des Jeux
olympiques d’été de 1988.

Avant la séparation du pays, la Corée du Sud était une région rurale qui s’est peu à peu
urbanisée. Les Séouliens n’avaient pas l’habitude de la vie urbaine et collective, certains
crachaient et urinaient dans le métro. Une éducation a donc été nécessaire, une
discipline a été mise en place. Aujourd’hui encore, les voyageurs sont dirigés dans les
moindres détails.
De petits clips dans chaque station leur expliquent comment s’asseoir : ne pas écarter les jambes, pour les femmes ne pas les croiser, et surtout ne pas se toucher. Une petite vidéo apprend aux enfants comment tenir la rampe de l’escalator. Sur les quais une vingtaine de masques à gaz sont prévus en cas d’incendie, avec un film expliquant les gestes à faire. S’il y a plus de vingt personnes, que fera la vingt et unième ? Ce n’est pas prévu !…
Dans chaque wagon, quatre banquettes sont réservées aux vieux et un siège en velours
rose aux femmes enceintes. Dans les stations, les toilettes sont impeccables, la
décoration de celles des enfants est inspirée des mangas : couleurs pastels et réservoirs
d’eau en céramique sculptés en forme de petits chats et de petits ours.
Le métro de Séoul est entièrement équipé en wifi. Avec le développement des
smartphones Samsung et LG, les voyageurs, toutes générations confondues, sont
connectés non-stop. Du matin au soir, les Séouliens, écouteurs sur les oreilles, gardent
les yeux rivés sur leur petit écran. Certains regardent la télévision coréenne quand d’autres jouent, les femmes l’utilisent comme miroir pour se maquiller… Ils s’en servent
rarement comme téléphone, car parler en public est mal vu. Traditionnellement en Corée, l’espace public, qui commence au seuil de la maison, est considéré comme « l’étranger ».
Donc dans le métro pas de contact entre voyageurs, et il n’est même pas et il est hors de question de jeter un œil sur l’écran du voisin. Julien ne se pose pas la question de savoir si on peut regarder l’écran du voisin ou pas, il le fait sciemment. Étrangement, aucun voyageur n’y a porté attention, sans doute parce qu’il est resté invisible à les photographier avec son smartphone, arme redoutable.
L’œil incisif de Julien scrute ce monde surréaliste digne d’une caverne d’Ali Baba connectée, mélange de tradition et d’hypermodernité. Ses photos, tout à fait personnelles,
influencées par son œil occidental, donnent à voir la vie étrange qui anime les wagons
jour et nuit. Ce travail esthétique et sociétal est le miroir d’un pays qui s’est développé
trop vite depuis la guerre. Il nous fait aussi réfléchir sur la morale de la technologie à
outrance. Une mise en abîme saisissante.
Françoise Huguier

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