« Mes amis » – Emmanuel Bove

Les Éditions l’Arbre Vengeur ont réédité ces derniers jours le livre d’Emmanuel Bove, Mes amis, avec préface de Jean- Luc Bitton, postface de Jean-Philippe Dubois, illustrations de Francois Ayroles, bandeau avec citation de Samuel Beckett, rabats et table, bref un très bel objet pour un très beau et grand texte.
Emmanuel Bove brosse le portrait de Victor Baton et de sa psychologie profonde. De plus, il décrit minutieusement une époque et un décor, la ville de Paris après la première guerre mondiale. Le ton de Bove, ironique et compatissant, réussit à émouvoir sur les histoires de Victor Baton, ancien combattant de la guerre 14-18, qui erre dans Paris à la recherche d’un ami. L’intrigue est simple et le constat désabusé car cette recherche semble immanquablement vouée a l’échec. Victor Baton est un personnage commun, dans le sens d’un personnage anonyme à la recherche de sa place dans la grande ville.

« L’air frais du dehors ne chassa pas mon ivresse, La rue, pleine de monde, était floue comme quand on essaie les lunettes de quelqu’un. Les têtes des gens ressemblaient à des masques. Les phares des automobiles passaient a la hauteur de mon ventre. J’ avais du coton dans les oreilles. Les moteurs de taxis avaient un air de ferraille chaude, sans valeur. Le trottoir bougeait sous mes pieds, comme quand on se pèse. On eut dit une rue de rêve, avec des lumières n’importe ou. » p. 117.

Le style d’Emmanuel Bove passe par des phrases brèves qui impriment au récit un rythme et une vivacité qui accrochent le lecteur à chaque coin de page. Par des observations précises, annotations, images saillantes, échos sonores de la ville, il réussit en quelques lignes à poser un personnage, un contexte et un décor, en toute simplicité et avec tendresse.

« Les gares me font entrevoir un monde que je ne connais pas. L’atmosphère qui les enveloppe est plus subtile. J’aime les gares, la gare de Lyon particulièrement… Les gares me révèlent la vie privee des gens riches. Dans les rues, ceux qui ressemblent à tout le monde. Quand il quitte Paris, je les entends parler, rire, commander. Je vois comment ils se séparent. Cela m’intéresse, moi, le pauvre, sans bagages. On devine que ces voyageurs ne voudraient pas être à la place de celui qui, comme moi, les regarde partir.» p.127.

Cette nouvelle édition peut nous donner l’idée de lire ou relire Emmanuel Bove. Je pense que c’est une bonne idée.
Mes amisMes amis
Emmanuel Bove, Editions l’Arbre Vengeur.

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