C’est un album décalé et irrésistible qui ravira les plus petits et obligera les plus grands à le relire sans fin  à voix haute, pour le plaisir de tous . Où l’humour le plus fin le dispute à la cruauté la plus irrémédiable !
Notre ours, d’apparence impavide et même un brin benêt, cherche son chapeau rouge, qu’il a perdu . Tous les animaux questionnés répondent que « non, ils n’ont pas vu son chapeau » ; pourtant, le lecteur l’a bien vu, lui, sur la tête du lapin malin, lequel a noyé son mensonge sous un flot de paroles ! C’est alors que l’ours rejoint le lecteur, et repart immédiatement pour un demi tour arrière, l’œil pétillant, vers le coupable …. qui deviendra victime à son tour .
La force de Jon Klassen est de mettre en scène des images simples et rondes aux tons sépia très esthétiques, avec des dialogues courts et répétitifs, à quelques détails près, qui renforcent  le comique de situation . Beaucoup de sobriété pour une histoire très subtile .
Dans un premier temps, l’ours s’avance, de gauche à droite dans l’album, de manière un peu  automatique, et pose à chaque page la même question d’un œil éteint ; puis, dans une grande double page dont il occupe toute la place, couché et réfléchissant, il comprend qui a son chapeau, et il s’élance alors en sens inverse avec beaucoup de vitalité (« je VEUX mon chapeau » dit le titre ) sur un fond de couleur rouge, comme le chapeau et comme la colère qui anime sans doute notre prédateur …
Accessible à des tout jeunes lecteurs, mais riche de double sens  dont se régaleront les plus grands, c’est un album à partager, à lire à voix haute, et à relire encore. Le dernier dialogue est particulièrement savoureux et vient ôter toute illusion à qui voudrait croire que cet album n’est pas aussi un conte moral … très immoral !
A partir de 3/4 ans.
    Je veux mon chapeau – Jon Klassen
    éditions Milan – 12.20€